En dépit de nombreuses études étiologiques, l'origine du mongolisme
demeurait jusqu'à présent mystérieuse.
Sans doute, la coïncidence de la maladie chez des enfants jumeaux
issus du même oeuf, sa coïncidence rare mais possible chez des frères et
soeurs (2,3 et même 4),l'apparition de mongoliens et de non mongoliens dans la
descendance de femmes mongoliennes, laissaient entendre que le patrimoine
héréditaire jouait lui aussi un rôle dans son apparition, mais sans qu'il
soit possible de rattacher cette origine à un mode d'hérédité connu chez
l'homme.
Par contre, le rôle, possible d'une aberration chromosomique ne
pouvait a priori être exclu. (1)
Or, l'application au mongolisme d'une technique d'examen des
chromosomes par culture de tissu (fibroblastes) mise au point pendant les deux
années écoulées, a permis aux auteurs de cette communication de découvrir
une anonalie qui fournit une explication nouvelle de cette maladie. cette
anomalie (2) (3) qu'ils ont retrouvée constamment chez 7 mongoliens et 4
mongoliennes consiste en la présence d'un petit chromosome surnuméraire, en
forme de V et à centromère terminal (Vh).
L'intérêt de cette découverte est double :
1) Elle explique les conditions d'apparition du mongolisme (4) et
même l'influence sur sa fréquence du vieillissement paternel. Des exemples
d'aberration chromosomique de même ordre sont fournis en effet par plusieurs
espèces, D. Melanogaster en particulier. Or, chez cette dernière,
l'aberration responsable d'un cas de trisomie risque d'autant plus
d'apparaître que la femelle est plus âgée.
2) Elle apporte le premier exemple de maladie d'origine chromosomique
(trisomie) dans l'espèce humaine et de ses conséquences pathologiques. Il est
difficile en effet après analyse des images des caryotypes (4) de ne pas voir
un rapport entre la présence du petit chromosome Vh télocentrique
surnuméraire et le mongolisme.
S'il est encore impossible de prévoir l'importance du rôle joué par
ce type d'aberration chromosomique a l'origine des maladies héréditaires
humaines, il est incontestable que par l'intermédiaire du mongolisme sa
contribution à la pathologie est loin d'être négligeable. Cette découverte
fait apparaître les possibilités de l'étude directe des chromosomes
humains.
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Bibliographie
(1) Raymond TURPIN, Alexandre CARATZALI et Melle H. ROGIER. Étude
étiologique de 104 cas de mongolisme et considérations sur la pathogénie de
cette maladie (1937). 1er Congrès de la Fédération Internationale latine des
Sociétés d'Eugénique, p. 154 à p.164. Masson et C° éditeurs, Paris.
(2) J.LEJEUNE, M.GAUTIER et R.TURPIN. Les chromosomes humains en
culture de tissus C.R. Acad. des SC., 26 Janvier 1959, 248, 602--603.
(3) J.LEJEUNE, M.GAUTIER et R. TURPIN. Les chromosomes somatiques des
enfants mongoliens. C.R. .Acad. des Sc, 16 mars I159, 248, 1721-1722.
(4) J.LEJEUNE, R.TURPIN et M. GAUTIER. Le mongolisme, maladie
chromosomique. (trisomie) Bull. Acad. Nationale de Médecine. Séance du, 14
Avril 1959, tome 143, 11 et 12, p. 256 à p. 265 ; et Annales de Génétique,
n° 2 (sous presse).
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