L'essor de la Radiologie médicale, et l'utilisation industrielle de
l'énergie atomique, ont pour effet d'augmenter la quantité d'irradiation à laquelle sont soumises les populations humaines.
En raison des effets mutagènes des rayonnements ionisants, il est
dès lors nécessaire d'estimer les risques génétiques impliqués par cette
augmentation.
Pour ce faire nous envisagerons tout d'abord les mutations naturelles
et le fardeau génétique inévitable qu'elles imposent à notre espèce. C'est
à cet étalon que nous comparerons ensuite les effets prévisibles d'une
irradiation donnée.
Cette tentative de prévision nous amènera à passer en revue des
données fondamentales de la Radiogénétique, et à discuter des observations
déjà réalisées chez l'homme.
Haut
I. Les Mutations Naturelles
Les mutations naturelles, improprement appelées spontanées,
relèvent de très nombreuses causes qui restent en dehors du contrôle de
l'observateur. Comme l'on sait que les facteurs héréditaires sont portés par
les chromosomes, il est commode de classer les mutations en deux grandes
catégories.
Lorsque la lésion ou le changement intéressent une portion d'un
chromosome suffisamment importante pour être optiquement décelable, on parle
de mutation chromosomique.
Lorsque la lésion ou le changement ne porte que sur un segment très
localisé, échappant ainsi à la détection microscopique, on parle de mutation
ponctuelle ou génique.
Cette classification, fort utile pour la clarté du discours, ne se
réfère qu'à notre échelle d'observation et une amélioration du pouvoir
résolvant de nos appareils, ramènerait probablement au niveau chromosomique
nombre de lésions actuellement tenues pour " ponctuelles ". Il faut cependant
se souvenir que si les mutations " ponctuelles " se transmettent comme des
gènes mendéliens, les anomalies chromosomiques peuvent troubler le mécanisme
de la méiose et réaliser ainsi une classe génétique qu'il est logique de
considérer à part.
Haut
Les Mutations Chromosomiques et
Génomiques
Longtemps méconnues chez l'homme, alors que leur étude
systématique chez la Drosophile a permis l'établissement de la théorie
chromosomique de l'hérédité, les mutations chromosomiques connues à ce jour
sont fort nombreuses. Depuis la découverte du premier exemple humain, la
trisomie 21 du Mongolisme en 1959 (Lejeune, Gautier, Turpin), nombre
d'anomalies numériques différentes ont été décelées intéressant soit les
autosomes, trisomies 17 et (13 ou 14 ou 15), soit les chromosomes sexuels:
Haplo X, XXY, Triplo X, XXXY, XXXXY, etc.
De même les cas de translocation, depuis la publication du premier
exemple (Polydysspondylie) (Turpin, Lejeune, Lafourcade et Gautier, 1959) se
sont multipliés.
Enfin des exemples de délétions partielles sont aussi connus.
L'ensemble de cette nouvelle branche de la génétique en plein
essor, mérite un chapitre à part et il n'est ici évoqué que pour montrer le
rôle, relativement considérable que jouent les mutations chromosomiques dans
le fardeau génétique d'une génération. Du simple point de vue de la
fréquence on peut estimer que la trisomie mongolienne est rencontrée chez un
enfant sur 500 à la naissance. Le syndrome de Klinefelter serait presque aussi
fréquent et peut être aussi le triplo X. (quand on remarque que pratiquement
chaque cas individuel représente une mutation chromosomique nouvellement
apparue, on peut estimer que les accidents de la mécanique chromosomique
frappent au moins un pour cent des naissances vivantes. Leur rôle dans le
déterminisme de la morti-natalité, des malformations congénitales, des
monstruosités embryonnaires et des avortements spontanés est encore à préciser.
Cette étude des aberrations chromosomiques est particulièrement
importante dans l'évaluation des dangers de l'irradiation car les
non-disjonctions et les cassures et remaniements chromosomiques ont été les
premiers effets découverts, et l'on sait maintenant, par l'observation, qu'ils
peuvent être produits chez l'homme.
Haut
Les Mutations Géniques
Ces mutations invisibles avec les techniques actuelles et
n'interférant pas avec la mécanique meïotique sont à l'origine de la plupart
des maladies héréditaires connues chez l'homme. Par ailleurs les travaux
récents de radiogénétique expérimentale portent surtout sur ce type de
mutations et c'est essentiellement sur elles que portera la discussion qui va
suivre.
Haut
Caractères Généraux des Mutations
D'un point de vue très général les mutations présentent quatre
caractères essentiels : fortuité, stabilité, nocivité, fréquence.
1. Fortuité.
Le changement phénotypique, résultat d'une mutation, ne
présente aucun rapport avec la physiologie de l'organisme dans lequel la
mutation s'est produite, et est absolument imprévisible. La nature même de la
mutation : cassure chromosomique, remaniement, ou simple changement ponctuel au
génique, ne peut, elle aussi, être prédite. Enfin il n'existe aucune
différence de nature semble-t-il entre les mutations apparaissant
naturellement et des mutations provoquées. Tout au plus, la fréquence
relative des divers accidents possibles peut elle varier en fonction de l'agent
causal, sans que le processus intime puisse être tenu pour différent.
En définitive tout se passe comme si un point de l'immense
chaîne hélicoïdale de l'acide désoxyribonucléique était bouleversé, le
changement allant d'une simple inversion entre deux bases d'une même paire, à la désorganisation de tout un fragment.
Le fait que la lésion siège à l'échelle moléculaire permet de
concevoir parfaitement que ce remaniement physico-chimique puisse avoir des
conséquences phénotypiques totalement indépendantes de l'événement qui l'a
produit.
2. Stabilité.
Lorsque seule une petite partie du message héréditaire est
altérée, " la faute d'orthographe " est ensuite exactement répétée au
cours des duplications successives du matériel héréditaire, un peu à la
manière de l'erreur du copiste, scrupuleusement reproduite par ses successeurs
au cours des âges. Ainsi le message altéré devient une variante stable qui
ne peut se réparer elle même et que seule une erreur rigoureusement inverse
(et donc aussi peu probable que l'erreur primitive) peut venir corriger
(mutation reverse).
En d'autres termes, une mutation constitue une caractéristique
héréditaire nouvelle, aussi stable et aussi " naturelle " que la
caractéristique antérieure.
3. Nocivité.
Du fait de leur fortuité même l'immense majorité des mutations
sont défavorables. En effet toute altération du message génétique se
traduit par l'altération consécutive d'un processus biochimique. Au vu de la
complexité et de l'intrication des voies métaboliques permettant la vie
cellulaire, l'on conçoit qu'un dérèglement au hasard de l'une des réactions
n'ait guère de chances d'entrainer un fonctionnement plus harmonieux de
l'ensemble. Par ailleurs, les gènes constituant le patrimoine d'une espèce
ont été sélectionnés durant des millénaires et il est donc peu
vraisemblable que le premier changement venu ait quelques chances d'être
superieur à ces gènes, dits " normaux ", éprouvés par l'évolution.
Certes d'exceptionnelles mutations favorables doivent tout de
même parfois se produire puisque aucune évolution n'aurait eu lieu sans
elles, mais le nombre de générations nécessaires à l'acquisition d'un
nouveau caractère favorable situe ce problème largement en dehors des
perspectives humaines : A l'échelle des quelques siècles à venir, les
mutations sont dangereuses pour notre espèce.
4. Fréquence.
Malgré la fortuité des mutations, il est possible d'analyser
leur fréquence qui se trouve être relativement stable, du moins dans des
conditions constantes et pour un même gène donné.
Sans trop nous attarder sur les méthodes d'estimation de la
fréquence des mutations naturelles nous remarquerons qu'elle peut être
établie de deux façons différentes, directe ou indirecte.
Méthode directe. Dans le cas d'une affection dominante
d'expressivité complète, nous pouvons estimer que tout individu porteur de la
tare mais issu de parents indemnes est le résultat d'une mutation nouvelle. Si
nous recensons tous les tarés d'une population, soit T, dont M issus de
parents indemnes et si p est la fréquence de la tare dans la population, le
taux de mutation es égal à µ = M/T x p.
Cette méthode simple donne les résultats concordants pour de
nombreuses affections : Achondroplasie, Aniridie, Microphtalmie, Sclérose
tubéreuse de Bourneville, Rétinoblastome, syndrome de Waardenburg. La valeur
de µ varie de 10-6 à 5 x 10- 5 (cf. données
rassemblées par L. S. Pentose, 1959).
Une critique importante de ces résultats est que ces calculs
reposent sur le postulat d'une relation univoque : un locus ? un caractère.
En effet, si diverses mutations, à différents loci, sont capables de produire
la même entité clinique, nous ne mesurons plus un taux de mutations à un
locus donné, mais une somme de mutations indépendantes. Cette difficulté
n'est point insurmontable d'ailleurs tant que toutes ces mutations ont le même
mode de transmission (dominant). Le rapport M/T conserve en effet toute sa
valeur en nous apprenant quelle fraction des tarés le sont du fait d'une
mutation récente. Cette fraction représente exactement le nombre de malades
qui seraient produits de surcroît en cas de doublement de la fréquence des
mutations ainsi que nous le verrons tout à l'heure.
Une autre difficulté par centre vient affaiblir grandement la
validité de ces calculs. En effet, si l'expressivité du gène est variable et
si un certain nombre de sujets porteurs des gènes sort cliniquement indemnes,
ce mode de calcul surestime grandement la fréquence des mutations. Enfin, une
fertilité différentielle des porteurs tarés et des porteurs cliniquement
indemnes peut venir encore accroître ce biais.
Toutefois, l'ensemble des résultats ci-dessus peut être
partiellement contrôlé par la méthode indirecte que nous allons envisager
maintenant à propos des gènes récessifs et l'accord satisfaisant observé
entre les résultats de ces deux méthodes renforce la confiance que nous
pouvons leur accorder.
Méthode indirecte. Dans le cas de caractères récessifs rares,
l'immense majorité des malades sont issus de parents hétérozygotes, donc
cliniquement indemnes. Ainsi la détection des mutations récentes par le
critère : malade issu de parents sains, devient inapplicable. Un raisonnement
indirect peut alors être proposé.
En première approximation on peut supposer que la fréquence des
maladies génétiques est relativement stable et qu'au cours des siècles il
s'est établi un équilibre entre le nombre de gènes mutants apparaissant à chaque génération et le nombre de gènes défavorables éliminés du fait de
l'adaptation défectueuse des sujets malades. Même si les fréquences des
maladies varient très lentement au cours des siècles cette hypothèse que la
sélection naturelle compense exactement la pression de mutation ne conduit pas
à de graves erreurs, ainsi qu'il est facile de le montrer dans le cas de
maladies rares.
Connaissant la fréquence p2 de la tare, la relation simple µ =
(1 - f) p2 donne une bonne estimée du taux de mutation µ, si (1- f) exprime
la fréquence des gènes éliminés par la sélection. Le paramètre f a pour
pour valeur f = fertilité des tarés / fertilité des normaux.
Dans les diverses affections étudiées (idiotie juvénile
amaurotique, albinisme, ichtyose congénitale, cécité totale aux couleurs,
amyotonie congénitale, épidermo bullosa, microcéphalie et
phénylcétonurie), l'application de cette formule conduit à des résultats de
l'ordre de µ = 1 x 10- 5 à 5 x 10-6 avec une moyenne de 2,8 x 10-5 (Penrose,
1956).
Ces résultats concordent en gros avec ceux de la méthode directe
mais nécessitent une discussion particulière.
En effet ce raisonnement implique que les hétérozygotes (qui
peuvent transmettre la tare) aient un taux de reproduction identique à celui
des homozygotes normaux.
Si les hétérozygotes se reproduisent plus que les sujets
normaux, nous surestimons énormément le taux de mutation puisque la
fréquence des malades peut être maintenue, en dehors de toute mutation, par
ce seul phénomène de reproduction différentielle supérieure des
hétérozygotes.
Cette éventualité n'est nullement chimérique car l'on sait
depuis Allison (1955) que la fréquence très élevée du gène de l'anémie à hématies falciformes ne se maintient en Afrique centrale qu'en raison de
l'avantage sélectif que confère le gène anormal aux porteurs
hétérozygotes. Ces sujets sont en effet beaucoup plus résistants au
paludisme (et donc peuvent avoir plus d'enfants) que les homozygotes
normaux.
Par contre un effet défavorable du gène peut se manifester même
chez les hétérozygotes et le calcul précédent sous-estime alors la
fréquence réelle des mutations. Dans cette éventualité le rôle des
mutations dans le maintien de la fréquence de la maladie devient
prépondérant.
Ces discussions sur la fréquence des mutations spontanées ont
une importance primordiale dans l'estimation des risques génétiques de
l'irradiation : si la fréquence des malades dépend presque exclusivement de
l'adaptation meilleure des hétérozygotes, les mutations naturelles jouent un
rôle très faible dans la constitution du fardeau génétique réel et par
conséquent leur augmentation même importante pourrait passer presque
inaperçue ; par contre si les mutations sont l'élément majeur du maintien du
fardeau génétique, toute augmentation de leur fréquence sera lourdement
ressentie.
En dehors de très rares cas, il est malheureusement impossible de
préciser laquelle de ces deux hypothèses s'accorde le mieux avec l'ensemble
des mutations, et c'est cette incertitude de la génétique des populations qui
rend compte des larges divergences entre les estimations de la dose de
doublement d'une part, et de son retentissement possible sur la santé publique
d'autre part.
Cependant, ainsi que nous l'avons mentionné précédemment, la
fréquence des maladies chromosomiques et des tares géniques dominantes est
essentiellement maintenue par des mutations nouvelles et c'est sur ce chapitre
des effets immédiatement décelables que les prévisions peuvent s'exercer le
plus précisément.
Haut
II. Les Mutations Artificielles
Depuis les découvertes de H. J. Muller en 1927 il est établi que les
rayons X sont capables de provoquer des mutations dans les cellules qu'ils
traversent. Cependant de nombreux autres agents ont été secondairement
découverts et l'on peut établir trois grandes catégories de mutagènes :
les agents physiques ;
les agents chimiques ;
et enfin, faute d'un meilleur terme, les agents que nous appelerons
specifiques.
Haut
Les Données Classiques de la
Radiogénétique
Des champignons aux végétaux, et des infusoires aux mammifères,
on a pu montrer que tous les êtres vivants étaient sensibles aux rayonnements
corpusculaires et électromagnétiques capables d'ioniser fortement le milieu
qu'ils traversent.
Cette action mutagène s'étend des rayonnements radioactifs a, ß,
ou ?, aux rayonnements corpusculaires (rayons cosmiques, neutrons, etc.) en
passant par les rayonnements électromagnétiques, R. X. et rayons U. V. de
très courte longueur d'onde (moins de 313 mµ).
L'action mutagène des rayonnements ionisants a tout d'abord été
rapportée à l'ionisation même qu'ils produisent à l'intérieur des structures
cellulaires irradiées. Cependant on pense à l'heure actuelle que les
remaniements chimiques ou structuraux du matériel héréditaire sont le fait
des " radicaux actifs " produits in situ par les rayonnements. Ces radicaux
actifs sont des morceaux de molécule, électriquement neutres, mais dont les
liaisons de covalence ne sont pas toutes saturées. L'eau HOH est ainsi
scindée en un radical OH et en hydrogéne atomique H. Ces radicaux sont
extrêmement réactifs et sont capables de se recombiner en un temps
extraordinairement court avec les molécules qui les entourent, conduisant
ainsi à une mutation, si la molécule rencontrée se trouve être un gène. Une
démonstration directe de l'activité mutagène des radicaux actifs (en déhors
de tante irradiation) a d'ailleurs été apportée par Ahnstrom et Natarajan,
1960.
a) La relation linéaire
fréquence-dose.
La loi fondamentale de la radiogénétique est que " le nombre de
mutations produites est directement proportionnel à la quantité d'énergie
ionisante absorbée par les cellules ".
Cette loi traduit l'observation, abondamment vérifiée, que si
l'irradiation de spermatozoïdes de Drosophile avec 2000 r produit 5 % de
mutations létales liées au sexe, transmises à la descendance, une dose
double, de 4000 r produit 10 % de ces mêmes mutations, soit deux fois
plus.
Cette relation linéaire a été vérifiée jusqu'à des doses
relativement très faibles (25 roentgens chez la Drosophile) sa vérification
pour des doses de l'ordre d'un roentgen (celles qui nous intéressent
principalement lorsqu'il s'agit d'irradiation chronique) posant des problèmes
statistiques énormes du fait que les mutations ainsi provoquées sont à peine
plus nombreuses que les mutations naturelles.
Cependant, les recherches de Glass et Ritterhoff, 1961, portant
sur un million de Drosophiles leur ont permis d'affirmer que la linéarité
était vérifiée jusqu'à 5r, établissant ainsi une régression continue de 5
r à plus de 2000 r, pour les gamètes murs.
C'est seulement en faisant appel à des populations immenses, comme
celles des bactériophages, que les doses très faibles peuvent être aisément
testées. Encore faut-il faire la restriction qu'il s'agit d' " inductions "
d'un bactériophage et que l'on ne peut affirmer que cette " induction " soit
bien identique à une " mutation ". Quoi qu'il en soit, les études de Marcovich
(1954) lui ont permis d'inférer par un calcul relativement simple, que
certaines inductions étaient effectivement provoquées par l'impact d'un seul
photon de rayons X.
Un affect biologique reste donc possible avec la plus petite
quantité d'énergie libre et ceci renforce grandement la conclusion
fondamentale que l'on peut tirer de la relation linéaire fréquence/dose : il
n'existe pas de seuil â l'action mutagène des radiations, c'est-à -dire que
toute dose si minime soit-elle posséda un pouvoir mutagène très réduit mais
non nul.
Par ailleurs de multiples expériences, portant essentiellement
sur la Drosophile mâle, ont montré que les effets génétiques de petites
doses successives étaient additifs, c'est-à -dire qu'à dose totale égale, une
irradiation fractionnée provoquait autant de mutations qu'une irradiation
massive.
Enfin, il n'existe pas d'accoutumance aux radiations, même après
de très nombreuses générations exposées à un intense rayonnement. C'est
ainsi que Lüning et Jonsson (1957) ont montré qu'une population de
drosophiles, irradiée durant 60 générations à la dose énorme de 5 roentgens
par heure présentait, après une nouvelle irradiation brutale, une radio
sensibilité identique à celle d'une population de contrôle (non
irradiée).
L'ensemble de ces faits :
relation linéaire entre la fréquence des mutations et la dose de
rayonnement,
additivité des effets d'irradiations successives,
absence de seuil,
absence d'adaptation,
sont les bases fondamentales sur lesquelles reposent les
prévisions théoriques généralement présentées.
Cependant de nombreuses expériences récentes ont révélé que
ces lois n'étaient applicables que dans certaines conditions bien
précises.
b) Radio-sensibilité différentielle en fonction du
stade physiologique des cellules au moment de l'irradiation.
Une étude systématique des données disponibles sur la
fréquence des mutations induites à fortes doses a permis à Muller (1958) de
montrer que la radio sensibilité variait largement en fonction du stade
irradié. Par ailleurs la comparaison entre les expériences faites sur la
Drosophile et la souris montre une concordance nette de ce phénomène dans les
deux espèces.
Sans entrer dans le détail de ces discussions on peut remarquer
que chez la femelle, le stade oocyte est plus radio-sensible (Presque deux fois
plus) que le stade oogonie. Par ailleurs juste avant et juste après la
fécondation la radio-sensibilité est 6 à 12 fois plus élevée qu'au stade
oogonie.
Chez le mâle, en prenant pour 1 la radio-sensibilité des
spermatogonies on trouve une valeur 5 à 8 fois plus grande pour les
spermatocytes et 10 à 12 fois pour les spermatides. Les spermatozoïdes sont
environ six fois plus sensibles que les spermatogonies. Ici aussi, juste après
la fécondation, la radio-sensibilité s'élève à prés de 12 fois le niveau
gonial.
Ces données se rapportent à des mutations récessives létales
liées au sexe ou à des létaux dominants. Dans le cas de mutations visibles,
survenant à des loci bien connus les différences sont moins marquées, les
stades ultérieurs étant en moyenne 1,5 à 2 fois plus sensibles seulement que
le stade gonial.
Quoiqu'il en soit, ces recherches ont le grand intérêt de
montrer que le stade gonial (celui pour lequel le risque d'irradiation
chronique existe réellement chez l'homme) est moins sensible que les stades
plus différenciés sur lesquels portent la plupart des expériences.
L'importance de ces faits sur la notion d'additivité des effets
d'irradiations successives est difficile à apprécier chez l'homme mais les
estimations portant sur le stade gonial semblent les plus légitimes.
c) Effets de l'intensité de l'irradiation sur la
fréquence des mutations.
Les travaux de Russel et Kelly (1958), sur les effets comparés de
l'irradiation aiguë et de l'irradiation chronique, laissent à penser qu'une
dose totale donnée provoque moins de mutations si elle est étalée dans le
temps (par irradiation chronique sous très faible débit) que si cette même
dose est appliquée massivement (débit très grand) en un temps court.
Il ressort de ces travaux que les irradiations chroniques
provoquent (à dose égale) à peu près quatre fois moins de mutations que les
irradiations aiguës. Ces données sont en agrément avec les résultats de
Carter, Lyon et Philips, 1958.
Un phénomène intéressant est mis aussi en évidence par Russel
: à savoir que les deux types d'irradiation, aiguë ou chronique, donnent
toutes deux une réponse linéaire (pour les doses inférieures à 600 r). Seule
la pente des droites, le coefficient d'efficacité, diminue avec les très
faibles débits.
Contrairement à ce qui aurait pu être conclu prématurément de
ces expériences, il n'existe aucune raison de penser qu'il y ait un seuil à l'action mutagène des radiations. En effet si cette réduction par un facteur
de 4 entre une irradiation avec un débit de 90 r/minute, et un débit de 90
r/semaine, existe bien, une nouvelle réduction du débit de 90 r/semaine à 10
r par semaine ne diminue plus la fréquence des mutations provoquées (Russel
et Kelly, 1960).
Au total il semblerait: qu'au delà d'un certain débit l'effet
plus nocif des irradiations massives soit dû à la sidération des processus
cellulaires de réparation et qu'ainsi une certaine fraction des mutations qui
peuvent se " réparer " sous faible débit, devienne " incurable " sous forte
irradiation.
d) Réparation des mutations.
Cette explication proposée par Russel et Kelly est à rapprocher
de l'observation de Lüning et coll. (1957, 1958 et 1959) qu'il semble exister
après irradiation un. certain laps de temps au cours duquel une certaine
fraction des " mutations " peut être réparée. De même les expériences de
Sobels ( 1960), montrent que le blocage des systèmes respiratoires par le
cyanide, conduit à une augmentation de la fréquence des mutations
radio-induites, probablement en entravant le processus de réparation.
D'autres expériences sur les microorganismes ont d'ailleurs
montré crue ce temps de latence entre l'irradiation et l'installation
définitive de la mutation pourrait se prolonger jusqu'à la duplication de
l'acide désoxyribonucléique qui suit immédiatement l'irradiation (Kimball,
1959).
e) Les anti-mutagènes.
Ces observations sur la possibilité de réparation des mutations
sont l'objet de nombreuses recherches actuelles. Cependant, depuis 1950 (Bayer
et Sgourakis), on sait qu'en dehors des radiations produisant une ionisation
extrêmement dense (Rayons a, neutrons et électrons lents) l'effet mutagène
dépend de la pression partielle d'oxygène dans les cellules irradiées.
En règle générale, on peut définir l'effet oxygène en disant
que pour une dose de R. X. donnée, l'anoxie des cellules diminue le nombre des
mutations produites alors que la suroxygénation l'augmente. Il existe
cependant des exceptions et, de toutes façons, l'effet antimutagène de
l'anoxie diminue d'un facteur, de deux au plus, l'effet des radiations.
Par ailleurs, les substances radio-protectrices telles que la
ß-mercapto-éthylamine (Z. M. Bacq, 1951) et d'autres dérivés thiolés
exercent, elles aussi, une action radio-protectrice qui, pour certains auteurs,
se réduirait à une véritable action anti-oxygène ; pourtant certains autres
radio-protecteurs tels que l'alcool éthylique semblent agir en dehors de tout
effet oxygène.
f ) Les agents mutagènes chimiques et
spécifiques.
Avant d'aborder l'étude des effets génétiques des radiations
ionisantes chez l'homme, il n'est pas inutile de rappeler que de nombreuses
substances chimiques sont elles aussi mutagènes. Il n'est d'ailleurs nullement
impossible que ces mutagènes chimiques jouent dès maintenant un rôle dans
notre espèce, bien qu'on ne l'ait pas encore mis en évidence.
Depuis 1942 et la découverte par Auerbach et Robson de
l'activité mutagène du gaz moutarde ou " ypérite ", la liste des agents
radiomimétiques n'a cessé de s'accroître. C'est ainsi que les époxydes, les
péroxydes (comme l'eau oxygénée) et de nombreux carcinogènes ont été
reconnus mutagènes.
La seule parenté que l'on puisse trouver entre ces mutagènes,
appartenant à des familles chimiques très différentes, est leur grande
réactivité. Ce fait est à rapprocher de ce que nous avons dit précédemment
de l'action des radiations par l'intermédiaire des radicaux libres produits in
situ, et conduirait à penser que le mécanisme de base (changement chimique de
la molécule d'A. D. N.) pourrait bien être identique dans les deux cas.
Il est à remarquer cependant que le " spectre " des mutations
induites par agents chimiques varie assez largement de l'un à l'autre. Certains
d'entre eux provoquent préférentiellement les cassures chromosomiques en
certains points privilégiés (Moutschen Dahmen 1958) alors que d'autres
déterminent presque exclusivement des lésions ponctuelles non décelables au
microscope.
A côté des mutagènes chimiques, il faut réserver une place à des agents que, faute d'un meilleur terme, nous appellerons spécifiques. Ces
derniers agissent directement sur la structure du matériel héréditaire
lui-même C'est ainsi que des extraits purifiés d'A. D. N. (acide
désoxyribonucléique) provoquent chez les organismes inférieurs des mutations
dirigées (transformation du pneumocoque) (Avery et coll., 1944) et
transduction du bactériophage (Zinder et Lederberg, 1952).
Par ailleurs d'autres substances interférent directement avec le
métabolisme de l'A. D. N. Il est possible par exemple, d'obtenir chez
Escherichia Coli des mutations par carence en thymine des variétés qui ne
savent pas synthétiser cette base (Coughlin et Adelberg, 1956) et, chez le
bactériophage (Litman et Pardee, 1956), d'augmenter le taux de mutation en
ajoutant du 5-bromo-uracile qui se substitue à la thymine dans la synthèse de
l'A. D. N.
Ces agents spécifiques semblent donc agir de façon différente
des autres mutagènes, chimiques et physiques, en ce sens qu'ils interfèrent
directement et spécifiquement avec le métabolisme de l'A. D. N., vecteur de
l'information héréditaire. Les phénomènes de transduction et de
transformation représentent d'ailleurs une exception à la loi fondamentale de
la fortuité des mutations puisque la mutation est alors dirigée.
Haut
Les Causes des Mutations Naturelles
Cette brève revue des agents mutagènes nous permet d'évoquer
maintenant les causes des mutations naturelles.
Il est plausible que les différents mutagènes ci-dessus évoqués
jouent un rôle non négligeable et nous en discuterons plus longuement à propos de la dose de doublement. Le rôle des agents spécifiques est par
contre entièrement inconnu et peut être sera-t-il considéré comme
prépondérant dans l'avenir.
Restent encore deux possibilités d'apparition des mutations
naturelles: l'erreur de copie et la fluctuation locale d'énergie.
Lors des duplications successives du matériel héréditaire, chaque
chromosome est reproduit rigoureusement identique à lui même, et l'information
moléculaire qu'il contient est elle aussi scrupuleusement copiée. L'on
conçoit, cependant, qu'en dépit de l'extrême précision de ce mécanisme,
une " erreur de copie " puisse se produire, avec une fréquence non nulle, par
exemple l'adjonction d'une base thymine au lieu d'une base cytosine, donnant
lieu ainsi à une nouveauté génétique.
La fluctuation locale d'énergie peut elle aussi intervenir, du fait
de la nature statistique des lois gouvernant la stabilité des systèmes
moléculaires. Ainsi, soit du fait d'un changement thermique brusque dans le
voisinage d'un gène, soit même d'une concentration locale de l'énergie intra
atomique, normalement répartie sur toute la molécule, certaines liaisons
moléculaires peuvent être rompues d'où un réarrangement structural possible
de la molécule génique. Comme l'information génétique est transmise au
niveau d'une molécule individuelle, un tel événement, extrêmement
improbable et totalement indétectable à l'échelle d'observation du chimiste
ou du physicien, peut avoir une conséquence biologique précise.
Ces deux éventualités, erreur de copie ou fluctuation locale
d'énergie différent en ce sens que dans le premier cas l'erreur se produit au
moment de la transmission du message alors que dans le second c'est le message
lui même (gène en état de repos) qui se trouve fortuitement altéré.
Ayant présent à l'esprit ces données fondamentales de la
mutagénèse, naturelle et provoquée, nous pouvons envisager maintenant les
effets chez l'homme d'une augmentation de la fréquence des mutations.
Pour plus de simplicité nous envisagerons d'abord les observations
déjà réalisées d'une part sur les conséquences de l'irradiation des
cellules sexuelles (étude de la descendance d'individus irradiés), et d'autre
part les effets de l'irradiation des cellules somatiques études in vitro et in
vivo).
Secondairement nous tenterons de définir et d'estimer la dose de
doublement et d'envisager ensuite les retentissements immédiats et à très
longue échéance de l'irradiation de populations entières.
Haut
III. La Descendance des Sujets Irradiés
En raison de la nouveauté des problèmes posés par l'irradiation
artificielle de populations humaines, les enquêtes publiées jusqu'ici ne
portent que sur la première génération issue de parents irradiés.
D'ailleurs contrairement à une erreur trop répandue, cet état de fait ne
diminue nullement les conclusions que l'on peut tirer de ces travaux.
En effet, les croisements ne pouvant être dirigés, il est aisé de
montrer que l'étude de la première génération apporte plus d'informations
en elle-même que l'étude des générations ultérieures.
Haut
1. Particularités de la Descendance pouvant être
Rapportées à l'Apparition de Mutations Induites chez les
Parents.
Différents caractères quantitatifs tels que le poids de naissance,
la taille et diverses mesurations anthropométriques ainsi que des
particularités statistiques telles que la mortalité néo-natale, ont été
proposés et étudiés.
Malheureusement, on ne connaît pas de façon précise la base
génétique à laquelle les variations de ces caractères pourraient être
rapportées. On sait par contre, qu'ils sont sous la dépendance de nombreux
facteurs, économiques (niveau de vie), démographiques (âge des
procréateurs, rang de naissance, etc.) et sociologiques (soins médicaux),
etc.
Les caractères que l'on peut retenir se classent en deux
catégories selon, qu'ils se rapportent à des mutations dominantes (ou liées
au sexe) au à des mutations récessives liées aux sexe (chez les garçons
issus des femmes irradiées).
La détection de dominants visibles est pratiquement réalisée par
l'observation des malformations à la naissance. On peut en effet penser qu'une
augmentation de fréquence des mutations dominantes visibles se traduirait par
une augmentation de fréquence des malformations. Il en serait de même de
récessifs liés au sexe (chez les garçons issus de femmes irradiées).
Les mutations létales peuvent être décelées de quatre
façons.
Tableau I. Résumé des principales enquêtes menées sur la
descendance d'individus irradiés
Effets observés sur la descendance |
Causes de l'irradiation | Mode de l'irradiation et
dose gonade | Mortalité in utéro et néo-natale | Malformations
à la naissance | Sex ratio |
I. Fait de guerre Hiroshima et Nagasaki (Neel, Schull et
coll., 1953, 1956) (Schull et Neel, 1959) | Aiguë en une seule dose 8
Í 200 | Augmentation non significative | Pas d'effets
significatifs observés. Cardiopathies congénitales non
recensées | Significativement diminuée (mères irradiées) K = - 6 X
10-5 |
2. Radiologistes (Macht et Lawrence, 1955)
| Nombreuses petites doses | Augmentation non
significative | Augmentation significative. Cardiopathies
congénitales | Diminution non significative (pères irradiés) |
3. Radiologistes (Crow, 1955) | Nombreuses petites
doses | Augmentation non significative | Pas étudiées | Pas
étudiée |
4. Manipulateurs (Tanaka, Katumi, Koji, Ohkura,
1958) | Nombreuses petites doses 35 r par an | Augmentation
significative | Pas étudiées | Augmentation significative (pères
irradiés) |
5. Radiothérapie ovarienne (I. I. Kaplan, 1957) | 50
à 200 r (dose accumulée) | Pas d'augmentation | Pas
d'augmentation | Diminution significative (mères irradiées) K = - 8 X
10-4 |
6. Radiothérapie pelvienne (Turpin, Lejeune, Rethoré,
1956) | 40 à 450 r (dose accumulée) | Augmentation non
significative | Non significative | Diminution (mères irradiées)
K = - 6 X 10 -5 |
7. Radiothérapie pelvienne (Schulte et Sobels,
1961) | 100 à 300 r (dose accumulée) | Pas étudiée | Pas
étudiées | Diminution (mères irradiées) |
8. Radiothérapie extrapelvienne (Lejeune, Turpin, Rethoré
1959) | 1 à 20 r (dose accumulée) | Non publiée | Non
publiées | Diminution significative (pères irradiés) K non
estimé |
9. Radiothérapie extrapelvienne (Schulte et Sobels,
1961) | 1 à 20 r (dose accumulée) | Pas étudiée | Pas
étudiées | Augmentation non significative (pères irradiés) |
1) Augmentation de fréquence des avortements (pratiquement
impossible à déceler avec certitude);
2) Augmentation de la fréquence des mort-nés (beaucoup plus
réalisable mais sujette aux influences démographiques signalées à propos de
la mortalité néo-natale);
3) Diminution de la fertilité, ou même stérilité (pratiquement
impossible à mesurer chez l'homme);
4) Trouble du rapport des sexes à la naissance (déviation de la sex
ratio, critère très facilement observable).
Pour éviter une énumération fastidieuse, les résultats obtenus
dans les différentes enquêtes publiées à ce jour sont résumés dans le
tableau I. Ces enquêtes sont évidemment de valeur statistique assez variable
et l'échantillonnage témoin à partir duquel sont effectuées les comparaisons
n'est pas toujours à l'abri de la critique.
On peut cependant remarquer que lorsque des différences
statistiquement significatives sont observées elles tendent à montrer un effet
défavorable sur la descendance :
Augmentation des malformés (2).
Augmentation de la mortalité foetale (4).
Une nouvelle analyse des données japonaises (de Bellefeuille, 1960)
montrerait d'ailleurs cette même augmentation chez les enfants d'Hiroshima et
de Nagasaki.
En ce qui concerne la sex ratio de la descendance de mère
irradiée, une diminution de la fréquence des garçons est observée dans les
quatre enquêtes donnant des indications à ce sujet (1), (5), (6), (7). La
concordance de ces quatre enquêtes indépendantes révèle que cet effet sur
la sex ratio ne peut être dû au hasard.
Par contre les variations de la sex ratio en fonction de
l'irradiation paternelle sont beaucoup plus difficiles à interpréter, du fait
de la contradiction apparente des résultats (cf. infra).
Haut
2. La Notion de Dose de Doublement
En l'absence d'une relation expérimentale nous permettant de
prévoir le nombre de mutations individuelles produites par une dose d'énergie
ionisante donnée, les généticiens utilisent actuellement un paramètre très
simple appelé dose de doublement.
Il s'agit de la dose qui serait capable de doubler le taux actuel
des mutations, c'est-à -dire d'ajouter aux inévitables mutations naturelles
une quantité égale de mutations provoquées.
Il est évident que cette dose de doublement ne représente qu'une
valeur moyenne qui doit être pondérée sur de très nombreux gènes, afin
d'éliminer le fait que certains loci sont plus mutables que d'autres
(spontanément et artificiellement).
Plusieurs méthodes d'estimation sont ici possibles.
A) Estimation par analogie
Tout d'abord nous savons que du simple fait de la radioactivité
naturelle et des rayons cosmiques les gonades humaines sont exposées, dans
l'intervalle de 30 ans qui sépare deux générations, à une dose moyenne de 3
à 5 r. Si toutes les mutations naturelles étaient dues à cette radioactivité,
la dose de doublement serait du même ordre de grandeur.
Par contre si, par analogie avec ce qui se passe chez la
Drosophile, 2 à 20 % seulement des mutations naturelles étaient dues à cette
irradiation continue, la dose de doublement serait comprise entre 15 et 150
r.
Les doses de doublement calculées chez la souris, donc plus
applicables à l'homme que celles de la Drosophile, sont de l'ordre de 50 r dans
deux expériences différentes : Russel et coll. (1954) et Carter et coll.
(1956).
Il est à remarquer que ces doses de doublement sont à considérer
avec une certaine prudence car elles sont calculées sur sept mutations "
visibles " et l'on ne peut décider de la représentativité de cet
échantillon. Par ailleurs, l'irradiation en cause dans ces expériences est
aiguë et compte tenu de l'activité moindre des doses faibles, ces estimations
doivent être multipliées par un facteur de l'ordre de 2 à 4. Le seul travail
important sur la mesure directe d'une dose de doublement chronique amène en
effet à une estimée de 95 r pour la souris (Carter et coll., 1958).
De toutes façons l'intervalle probable de 10 à 100 r proposé
dans le Rapport des Nations Unies en 1957 semble devoir être conservé.
B) Etude de la sex ratio
Irradiation de la mère
Ainsi que nous l'avons noté en étudiant le tableau I, l'effet
de l'irradiation maternelle sur la sex ratio de la descendance semble bien
établi et c'est en fait le seul effet génétique actuellement démontré chez
l'homme.
L'utilisation quantitative de ces données se heurte à plusieurs
difficultés car d'une part un effet purement physiologique chez la mère ne
peut être formellement écarté, et d'autre part un échantillonnage de
référence, prouvant l'action identique des mutations spontanées est fort
difficile à rassembler.
Un calcul simple, mais dont la validité ne peut être
démontrée, a été proposé par Lejeune et Turpin (1957b).
Des données disponibles il ressort que la sex ratio diminue en
fonction de l'irradiation maternelle et l'on peut estimer que pour chaque
roentgen frappant les ovaires la valeur moyenne 0,515, est diminuée de -
0,00006.
Par ailleurs le simple vieillissement maternel diminue cette sex
ratio de - 0,00036 pour un vieillissement de 5 ans, Lejeune et Turpin (1957a).
Il faut noter cependant que si cette estimée élimine l'effet propre du
vieillissement paternel, elle ne peut écarter un effet possible du rang de
naissance, effet qui pourrait ne pas être négligeable.
Cependant, une diminution de la sex ratio en fonction du
vieillissement des procréateurs, a été indirectement retrouvée par
Cavalli-Sforza ( 1960) en observant que la sex ratio des enfants d'une femme
donnée était d'autant plus basse que le père de cette femme était plus
âgé au moment de la naissance de celle-ci.
Si donc l'on admet l'effet du vieillissement maternel seul, un
calcul simple peut être ainsi présenté, si l'on suppose :
1) que la diminution de la sex ratio en fonction du
vieillissement maternel, aussi bien qu'en fonction de l'irradiation, est le
reflet de mutations dévaforables pour le sexe mâle,
2) que ces variations de la sex ratio sont strictement
linéaires en fonction de l'âge d'une part et de l'irradiation d'autre
part,
3) que pour une même valeur numérique, ces déviations
correspondent dans les 2 cas à l'apparition d'un nombre identique de mutations.
On peut alors obtenir la dose de doublement D en résolvant : Km X âge moyen =
Ki X D soit : Km = - 3,36 x 10 - 4 pour un vieillissement de 5 ans, et en
posant un âge moyen de 30 ans environ, c'est-à -dire six fois l'intervalle de
5 ans, on doit avoir :
- 3,36 x 10-4 x 6 = - 6 x 10-5 x D d'où D = 30 r
En dehors de l'incertitude précédemment notée, sur l'effet
propre du rang de naissance, cette dose de doublement de 30 r, quoique
plausible, ne peut être adoptée sans discussion surtout en raison des
contradictions observées entre les différentes enquêtes sur la sex ratio des
enfants issus de pères irradiés. A ce propos nous pouvons cependant citer
l'approche fort différente de Frota-Pessoa et Saldanha (1960), qui, utilisant
les données de mortalité in utero, aboutissent à une estimée de la dose de
doublement pour l'homme, égale elle aussi à 30 r.
Irradiation du père
Les observations de Macht et Lawrence (1955) et de Lejeune,
Turpin et Rethoré 1959, révèlent une diminution alors que celles de Tanaka,
Katumi et Koji Ohkura (1958) et Schulte et Sobels (1961) semblent montrer une
augmentation. Peut être n'est-il pas inutile de se souvenir à ce sujet que les
expériences de Hertwig (1938) sur la souris mâle, révélaient une diminution
de la sex ratio à faible dose et une augmentation à farte dose. Par ailleurs
certaines données sur l'irradiation chronique des souris mâles avec 37,5 r
par génération (Carter, 1957) révèlent elles aussi une diminution. Dans
cette expérience la comparaison entre vieillissement et irradiation du père,
selon la méthode discutée précédemment, conduirait à une dose doublante de
60 r environ.
En l'état actuel des choses il est prudent de dire que si un
effet de l'irradiation de la mère sur la sex ratio est bien établi, il reste
une incertitude importante en ce qui concerne l'effet de l'irradiation
paternelle.
C) Etude des mutations somatiques
On sait que les mutations somatiques induites chez la souris par
les R. X. (Russel, 1957) se produisent avec une fréquence comparable à celle
observée pour les mutations germinales.
A partir de cette analogie il est possible de reconsidérer les
données humaines concernant les radiomutations, et plus spécialement les
études se rapportant à la production des leucémies par l'énergie ionisante.
Force est ici, pour simplifier à l'extrême, d'admettre que les leucémies
radio-induites ont pour cause une mutation somatique, sans préciser d'ailleurs
le mécanisme du phénomène très probablement fort complexe.
On s'aperçoit alors que les données sur l'irradiation de la
colonne vertébrale dans la spondylarthrite ankylosante (Court Brown et Doll,
1957) conduisent à une dose de doublement de l'ordre de 30 r, alors que les
observations faites sur l'irradiation in utero (Stewart et Webb, 1958)
conduisent à une dose de l'ordre de 3 r seulement. A ce sujet une nouvelle
enquête de Court Brown, Doll et Bradford-Hill (1960) n'a pas confirmé les
données de Stewart et Webb mais ces résultats, quoique négatifs, ne
permettent pas d'écarter les résultats précédents.
De toutes façons, étant donné les difficultés théoriques
liées à ces observations (Lejeune et Turpin, 1958), ces estimations ne peuvent
être tenues pour rigoureuses et leur signification est même encore
obscure.
D'autres effets de l'irradiation du foetus ont été récemment
décrits par Lejeune, Turpin, Rethoré et Mayer (1960). La fréquence des
hétérochromies segmentaires de l'iris est largement supérieure chez les
enfants irradiés in utero à celle observée chez leurs frères et soeurs non
irradiés ou chez des enfants témoins. Cette action sur la pigmentation
irienne peut relever de nombreux facteurs : mutation, non-disjonction mitotique
ou délétion chromosomique, mais ne parait explicable que par un phénomène
génétique au sens large du terme.
Si ces données ne permettent pas d'établir une dose de
doublement, car il est possible que certaines de ces anomalies pigmentaires ne
se produisent pas spontanément, elles ont tout au moins l'intérêt de montrer
que des doses de 2 à 3 r sur le foetus sont susceptibles de produire des
changements génétiques dans les cellules somatiques.
Une autre possibilité d'étude des mutations somatiques,
spontanées et radio-induites, a été ouverte par les recherches d'Atwood et
Scheinberg (1958). Ces auteurs en détectant chez les individus du groupe
sanguin A 0 des érythrocytes non agglutinées par l'ami A ont pu mettre en
évidence l'origine très vraisemblablement mutationnelle de ces cellules
exceptionnelles. Une étude détaillée de ce phénomène les conduit à estimer
un taux de mutation spontané de l'ordre de 7 x 10 - 6 par division cellulaire.
Soit un ordre de grandeur comparable à celui des mutations germinales
spontanées décelées dans notre espèce.
Les effets de l'irradiation médullaire sur la fréquence de ces
cellules exceptionnelles sont actuellement étudiés par ces auteurs.
D) Etude des mutations chromosomiques
a) Etudes in vitro
Ainsi que nous l'avons signalé au début de cet article, les
rayonnements ionisants sont susceptibles de produire des accidents visibles sur
les chromosomes.
Plusieurs expériences d'irradiation de cultures de cellules
humaines ont permis de dénombrer les cassures chromosomiques produites par
l'irradiation et de comparer les effets ainsi observés avec l'évolution
spontanée des mêmes cultures non irradiées.
Des données de Bender (1958), promoteur de la méthode, il
ressort que 3 r seulement seraient capables de doubler la fréquence spontanée
des cassures chromosomiques.
D'autres travaux, Puck (1958) et Chu (1959) confirment la très
grande sensibilité des chromosomes humains aux R. X, et semblent démontrer
qu'une dose aussi faible que 50 r serait suffisante pour produire en moyenne
une cassure chromosomique par cellule irradiée.
Les enseignements que l'on peut tirer de ces expériences ne
sont malheureusement pas directs, car nous ignorons quel est le devenir
génétique de ces cassures chromosomiques.
Un certain nombre d'entre elles de " recollent " très
probablement et n'ont donc pas d'effet dangereux. D'autres conduisent à des
remaniements structuraux qui peuvent provoquer de tels troubles à la méiose
que les cellules qui les portent ne peuvent donner de gamètes
fonctionnels.
C'est pour pallier cette difficulté que l'étude des anomalies
chromosomiques liées à des syndromes malformatifs connus (mongolisme par
exemple) a été proposée (Lejeune, 1959).
b) Etudes in vivo
L'étude in vitro, pour précise qu'elle puisse être, laisse
planer un doute sur la validité des résultats observés en ce sens que la
physiologie cellulaire peut être affectée par les conditions anormales du
milieu artificiel. C'est pourquoi un parallèle entre l'effet in vivo et
l'effet in vitro doit être abordé expérimentalement. Les travaux de Bender
(1959) révèlent d'ailleurs que les cellules de rein de singe (Ateles)
cultivées in vitro et les cellules de moelle osseuse du même individu
irradiées in vivo, possèdent une radiosensibilité du même ordre de
grandeur, les cellules in vivo étant peut être un peu plus résistantes. De
toutes façons, ces travaux confirment entièrement le grande efficacité des
R. X. sur les chromosomes humains, l'effet précédemment cité d'une cassure
par cellule après une irradiation de 50 r s'appliquant fort bien à ces
données nouvelles.
Chez l'homme il ne semble pas qu'un parallèle in vivo - in
vitro ait encore été réalisé mais il est dès maintenant avéré (Tough,
Buckton, Baikie et Court Brown, 1960) qu'une irradiation vertébrale de 250 r
produit des anomalies chromosomiques en quantité suffisante pour être
décelée par les techniques actuelles sur les mitoses obtenues à partir de
globules blancs circulants.
De même, Boyd, Buchanan et Lennox détectent des anomalies
chromosomiques, comparables à celles décrites par Tough et coll. après 250 r,
chez des sujets ayant reçu 100 mC d'iode 131. D'après ces auteurs l'effet de
10 mC seulement serait déjà décelable.
Enfin, dans une observation plus douteuse, il est vrai, Stewart
et Sanderson (1961), auraient détecté la présence d'un grand chromosome
anormal (dicentrique) dans le sang d'un individu irradié 8 heures avant avec
seulement 2 r (Radiophotographies).
Bien que ces observations en soient encore à leur tout début,
il est légitime d'en conclure que la radiosensibilité des chromosomes humains
est fort élevée et que cette nouvelle façon d'aborder les effets des
radiations ionisantes est susceptible de rendre les plus grands services dans
un futur très proche.
En marge de ces effets déjà connus, les aberrations
chromosomiques sont peut être en partie responsables des anomalies, de la sex
ratio de la descendance de mères irradiées. On sait en effet que
l'irradiation des ovaires augmente très fortement la fréquence des
non-disjonctions et que l'effet en est d'autant plus marqué que l'oeuf vierge
est plus âgé (Patterson, Brewster et winchester, 1932). Dès lors s'il se
produit dans la descendance de mères irradiées des sujets haplo X et haplo Y
ou des Triplo X et des XXY, et si la viabilité des combinaisons haplo Y et XXY
est notablement plus faible que celles des combinaisons haplo X et Triplo X
respectivement, on doit obtenir au total une diminution du nombre des garçons
nés vivants. Un tel phénomène, qui, s'il joue un rôle important, pourrait
être actuellement détecté dans la descendance de mères irradiées,
représenterait le premier effet " visible " des mutations chromosomiques
radio-induites chez l'homme.
Cette revue des données obtenues par enquêtes et des quelque
précisions expérimentales actuellement publiées, nous amène à la conclusion
que la dose de doublement pour notre espèce ne peut être fort différente de
ces diverses estimations, assez concordantes.
En résumé, nous pouvons dire que la dose capable de provoquer
autant de mutations artificielles qu'il s'en produit spontanément dans
l'intervalle de 30 ans qui sépare deux générations est probablement de
l'ordre de 30 r. Les limites probables entre lesquelles la valeur réelle du
paramètre a toutes chances de se trouver peuvent être fixées ainsi que le
propose le rapport du Comité Scientifique des Nations Unies à 10 r comme
valeur inférieure et 100 r comme valeur supérieure.
Il est à préciser que cette dose s'entend d'une irradiation
aiguë (même à dose très faible comme c'est le cas de l'irradiation médicale
et des irradiations accidentelles) et que l'irradiation chronique conduirait à une dose doublante plus élevée, de 100 à 150 r peut être.
Haut
IV. Le Danger des Mutations Artificielles
En supposant que les mutations artificielles soient identiques par
leur nature et leurs conséquences aux mutations naturelles, la dose de
doublement précédemment définie permet de chiffrer simplement les effets
attendus. En effet si la population étudiée n'est soumise qu'à une fraction
de la dose doublante, les effets ne seront qu'une fraction proportionnelle de
cieux envisagés, ce qui permet de résumer en un seul paramètre tous les
éléments d'estimation. Certes les limitations du concept même de dose de
doublement discutées plus haut, ne doivent pas être oubliées, et ce
paramètre ne représente en définitive qu'une manière commode de résumer
l'ensemble de la discussion.
Les effets d'un doublement de la fréquence des mutations dépendent
de toute évidence de leurs manifestations phénotypiques et, en premier chef,
de leur dominance (détection immédiate) ou de leur récessivité (détection
clinique après un certain nombre de générations). Enfin certaines mutations
n'ont pas d'effet spécifique mais influent simplement sur des caractères
quantitatifs, tels que la taille, la durée de vie ou l'intelligence.
Nous envisagerons donc :
1) les effets visibles dès la première génération (mutations
dominantes) ;
2) les effets à long terme, se manifestant progressivement au cours de
10 ou 20 générations ;
3) les effets quantitatifs, se manifestant progressivement eux
aussi.
Haut
1. Effets dès la Première Génération
Dans l'hypothèse la plus simple, nous pouvons admettre que la
fréquence des tares génétiques actuellement présentes est la résultante
d'un équilibre entre la fréquence des mutations naturelles pour un gène
donné, et le taux relatif de reproduction des individus tarés.
Il est alors facile de concevoir que, si le taux des mutations se
trouve doublé de façon continue, un nouvel équilibre ne pourra s'établir
que lorsque la fréquence des tarés sera devenue égale au double de la
fréquence actuelle.
Dans le cas de gênes dominants très défavorables c'est-à -dire
lorsque la plupart des cas existants sont déjà dûs à des mutations récentes,
cet équilibre est atteint très rapidement. L'on peut dire, par exemple, qu'en
un demi-siècle le doublement de la fréquence des mutations produirait, entre
autres, deux fois plus de nains achondroplases, d'aveugles par rétinoblastome
ou par aniridie, d'idiots par sclérose tubéreuse, d'infirmes par myopathie du
type Duchène et d'hémophiles que nous n'en dénombrons actuellement.
En dehors de ces mutations géniques le problème des aberrations
chromosomiques est peut être encore plus immédiat. La plupart des variétés
connues sont incompatibles (ou presque) avec la reproduction, et leur
fréquence actuelle s'élevant à près d'un pour cent des naissances vivantes,
un doublement de ce chiffre représenterait un danger immédiat, peut être le
plus important de tous.
Il est à l'heure actuelle impossible de parler de " dose doublante "
pour les aberrations chromosomiques. Tout au plus peut on dire que chez la
Drosophile la relation linéaire entre la fréquence des non-disjonctions et la
dose ovaire est bien établie (Demerec et Farrow, 1930) et que des
confirmations chez la souris ont déjà été obtenues par Russel et Russel
(1961).
A la lumière des observations sur la radiosensibilité des
chromosomes humains il apparaît que ce danger des aberrations chromosomiques,
entièrement méconnu il y a deux ans, puisse être en fait le risque le plus
grave de l'irradiation tout au moins dans le futur immédiat.
Haut
2. Effets sur les Générations
Ultérieures
Si la dose de doublement est appliquée de façon continue sur
toutes les générations successives, l'accumulation lente des mutations
aboutit à un nouvel équilibre entre fréquence des maladies et élimination
par sélection naturelle, lorsque le nombre des malades est lui aussi doublé.
Cependant, la fréquence des malades variant comme le carré de la fréquence
du gène, cet accroissement est extrêmement lent et il faut, selon
l'équilibre de départ, de dix à cinquante générations pour aboutir au
doublement de la fréquence des malades. On voit ainsi que le nombre
respectable de siècles mis en jeu ne permet pas une prévision utile, eu
égard aux incertitudes des données actuelles.
De même une éventuelle stérilisation progressive de l'espèce est
totalement improbable du moins aux doses envisagées (Turpin et Lejeune,
1955).
Par contre, l'accumulation de gênes récessifs légèrement
défavorables à l'état hétérozygote réalisant par exemple les classiques
prédispositions aux affections organiques pourraient en définitive du fait de
leur nombre (et non de leur gravité) représenter pour la société un fardeau
peut être plus lourd que celui des tares très graves et très
spectaculaires.
C'est probablement l'accumulation de mutations de cet ordre qui
explique la diminution sensible de l'espérance de vie, observée par Russel
(1957), dans la descendance de souris mâles irradiées.
Haut
3. Effets Quantitatifs
Les effets de l'accumulation de mutations légèrement défavorables
à l'état hétérozygote, ou même, exclusivement à l'état homozygote, sont
beaucoup plus difficile à préciser. Nous savons cependant que de nombreux
caractères quantitatifs, tels que la longévité déjà envisagée, la taille,
et surtout l'intelligence sont sous la dépendance d'équilibres très
complexes réalisés entre de très nombreux gènes.
Les effets possibles sur l'intelligence nous intéressent au plus
haut point puisque ce caractère est le plus " humain " de tous.
Une discussion mathématique précise de ce difficile problème
serait ici superflue, mais il est possible d'en résumer les conclusions ainsi
:
1) une augmentation de la variance de la population est attendue,
c'est-à -dire une augmentation de la fréquence des individus peu doués, et
parallèlement de celle des individus très doués.
2) Cette augmentation des extrêmes n'est pas nécessairement
symétrique et si, comme certaines considérations peuvent le faire craindre
l'augmentation relative des moins doués est nettement plus importante que
celle des bien doués, la moyenne globale de la population tend à diminuer.
Bien que ces considérations soient un peu trop générales on peut
cependant en retenir qu'une augmentation de la fréquence des individus très
intelligents n'est que possible et, à vrai dire, peu probable, et qu'un effet
défavorable sur la niveau mental moyen de la population est à redouter.
Haut
Irradiation Génétiquement Active Résultant de
l'Utilisation Actuelle de l'Énergie IonisanteHaut
a) Irradiation d'origine médicale
Tous les examens radiologiques quels qu'ils soient entraînent une
certaine irradiation des gonades. Bien entendu la dose reçue peut être
extraordinairement faible lorsque les gonades sont très éloignées du champ
irradié (radio du thorax, de la tête ou des membres) ou au contraire assez
élevée lorsque les gonades sont dans le champ radiographique (bassin, par
exemple).
Cette irradiation parasite des gonades dépend non seulement du
sujet lui-même, de la région examinée, du nombre des examens et de leur
durée, mais encore du type d'appareil utilisé et du mode de réception de
l'image : radiographie, radiophotographie ou radioscopie.
Il est donc très difficile d'établir une valeur moyenne pour
l'ensemble d'une population. Toutefois les enquêtes réalisées dans trois
pays différents aboutissent à des estimées très concordantes de la dose
gonade/30 ans reçue en moyenne par nos contemporains du seul fait du
diagnostic radiologique. Les chiffres sont de 1 à 3 r pour l'Angleterre
(Rapport anglais), de 4 à 5 r pour les Etats Unis (Laughlin et Pullmann, 1957)
et d'un peu plus de 4 pour la France (Reboul et coll., 1957).
On voit par ces chiffres que l'exercice normal de la médecine
entraîne pour les populations une irradiation artificielle des gonades égale
ou peut âtre supérieure à l'irradiation naturelle, dans les pays
techniquement développés.
Les conséquences génétiques de cette irradiation peuvent être
calculées en fonction de la valeur de la dose de doublement discutée plus
haut.
Il en ressort que le simple usage médical des Rayons X ajoute un
nombre de mutations supplémentaires de l'ordre de 1/10 à 1/50 du nombre des
mutations naturelles.
Un tel effet génétique ne met évidemment pas en jeu la survivance
de la société et la détection de l'accroissement consécutif du nombre de
malades est statistiquement presque impossible. Cependant si l'an veut bien se
rappeler que l'effet nuisible d'une mutation s'exerce en infligeant à son
porteur un défaut morphologique au fonctionnel s'exprimant en douleurs et
déchéances individuelles, ces conséquences ne peuvent être tenues pour
négligeables.
Haut
b) Irradiation d'origine industrielle ou
militaire
Par comparaison avec l'irradiation médicale, les usages militaires
et industriels actuels de l'énergie atomique (y compris la retombée
radioactive des expériences thermo-nucléaires) représentent une dose très
faible (dose gonade/30 ans probablement inférieure à 1/10 de roentgen d'après
le Rapport des Nations Unies).
Cependant, l'extension des centres atomiques utilisant l'énergie de
fission conduira inévitablement à une augmentation de cette irradiation, même
si le problème aigu de l'évacuation des déchets radio-actifs peut être
techniquement résolu.
Le problème des effets génétiques de l'usage militaire des engins
atomiques au cours d'une guerre dépasse entièrement le domaine des
prévisions scientifiques. Cependant certains auteurs ont estimé (Stern, 1961
) que les survivants du désastre pourraient être soumis au jours des
générations ultérieures à une irradiation chronique de quelques 450 r par
génération.
En dehors de la destruction massive des populations il n'est pas
démontré que la reproduction de notre espèce puisse se poursuivre en un
milieu si fortement contaminé.
Pour revenir aux usages pacifiques de l'énergie ionisante il est
logique de se demander si l'irradiation nuisible des gonades humaines est une
inévitable rançon des bienfait; dont nous sommes redevables à la radiologie
médicale.
Une étude de ce problème montre fort heureusement qu'il n'en est
rien et que cette irradiation parasite peut être réduite à un niveau quasi
négligeable.
 Fig. 1. Evolution du rapport dose/gonade sur la
dose/peau en fonction de l'âge du sujet, lors des examens radiophotographiques
systématiques (d'après Turpin, Dupire, Lejeune et Jammet, 1958)
Une enquête fort simple par exemple (Turpin, Dupire, Lejeune et
Jammet) illustrée par la figure 1, révèle que l'irradiation relative des
gonades lors des radiophotographies systématiques du thorax, décroît
exponentiellement en fonction de l'âge des sujets examinés.
Cette régression est due au simple fait que les gonades des adultes
sont plus éloignées du bord du faisceau que celles des petits enfants, pour
une raison de taille évidente, car l'écran et le diaphragme sont fixés une
fois pour toutes sur le type d'appareil utilisé. Bien que dans tous les cas
les gonades soient en dehors du faisceau, un diaphragme adapté à la taille du
sujet permettrait de diminuer notablement le rayonnement diffusé au niveau des
gonades des enfants.
Sans entrer ici dans les considérations de techniques
radiologiques, telles que l'emploi de kilovoltages élevés, d'écrans
renforçateurs et d'amplificateurs de brillance il est possible d'affirmer que
la modernisation des équipements et leur adaptation à chaque cas permettrait
de réduire l'irradiation d'origine médicale au 1/100 de ce qu'elle est
actuellement.
Il est à remarquer d'ailleurs que seuls les examens de diagnostic
sont ici en cause car la radiothérapie correctement utilisée (R. X., Cobalt,
Isotopes) ne présente guère de dangers génétiques, le nombre des sujets
traités est en effet très faible par rapport à la population générale, et
la grande majorité d'entre eux ont déjà dépassé l'âge de la reproduction
lors de la mise en oeuvre du traitement.
Haut
Conclusion
L'ensemble des faits précédemment rapportés permet de tirer trois
enseignements importants.
1) L'observation des enfants nés des parents irradiés, aussi bien
que l'étude des anomalies chromosomiques produites in vitro et in vivo
démontrent la validité générale des lais de la radia-mutagénèse et la
légitimité de leur application à l'espèce humaine.
2) L'absence de seuil à l'action mutagène des radiations et la nature
défavorable de l'immense majorité des mutations nouvelles permet d'affirmer
que toute irradiation frappant les organes sexuel de sujets en âge de se
reproduire est génétiquement nuisible et doit être systématiquement
évitée.
3) Il est techniquement passible de réduire à un minimum quasi
négligeable l'irradiation parasite des gonades humaines lors de l'usage
médical des Rayons X et tous les moyens doivent être mis en oeuvre pour
obtenir cette réduction. Cette nécessité de limiter l'exposition des sujets
jeunes aux radiations ionisantes a d'ailleurs été précisée à plusieurs
reprises (Turpin, Lamy, Bernard, Lefebvre et Lejeune, 1957), (Rethoré,
1957).
Les estimations présentées dans ces pages sont sujettes à révision
mais nous savons avec certitude que les radiations ionisantes font peser une
menace sur les générations à venir. En dépit des lacunes de nos
connaissances, les médecins et tous les utilisateurs des radiations
ionisantes, doivent en être avertis car il s'agit de la préservation du bien
le plus précieux que notre génération puisse transmettre à ses descendants,
les qualités héréditaires de l'homme.
Haut
Résumé
L'étude des conséquences génétiques de l'irradiation des gonades
humaines est tout d'abord basée sur les observations expérimentales. Les
trois constatations fondamentales - relation linéaire entre fréquence des
mutations et dose d'irradiation - additivité des effets d'irradiations
successives - absence de seuil à l'action mutagène, sont amplement vérifiées
même chez les mammifères. Seule une action plus marquée de l'irradiation
aiguë par rapport à l'irradiation chronique vient compliquer les
estimations.
Récemment deux types d'observations réalisées chez l'homme ont
permis de mieux préciser les effets des radiations.
D'une part l'étude de la descendance de sujets irradiés fournit des
indications sur les variations de la sex ratio.
D'autre part, l'analyse des aberrations chromosomiques radio-induites
in vitro et in vivo permet d'aborder le problème sous un angle nouveau, quasi
expérimental.
L'ensemble des données actuelles permet de conclure que la dose de
doublement pour notre espèce est assez basse, très probablement inférieure à cent roentgens. La condamnation formelle de toute irradiation inutile des
gonades est la conclusion logique de ces constatations.
Haut
Riassunto
La studio delle conseguenze genetiche dell'irradiazione delle gonadi
umane è basato, anzitutto, sulle osservazioni sperimentali. Le tre
constatazioni fondamentali: relazione lineare fra la frequenza delle mutazioni
e la dose di irradiazione; aggiunta degli effetti delle irradiazioni
successive; assenza di opposizione all'azione mutagena; - vengono
frequentemente osservate anche nei mammiferi. Soltanto un'azione
dell'irradiazione acuta piu marcata di guetta dell'irradiazione cronica viene a
complicare le valutazioni.
Recentemente due tipi di osservazioni Patte nelluomo hanno permesso di
precisare meglio gli effetti delle irradiazioni.
Da una parte, lo studio della discendenza dei sog getti irradiati
fornisce delle indicazioni sulle variazioni delta sex-ratio. D'altra parte,
l'analisi delle aberrazioni cromosomiche radio-indotte in vitro ed in vivo,
permette di affrontare il problema da un nuovo angolo, quasi sperimentale.
L'insieme dei dati attuali permette di concludere che la dose di raddoppio per
la nostra specie è molto balsa, molto probabilmente inferiore a 100 roentgens.
ana condanna formole di qualsiasi inutile irradiazione delle gonadi è la
conclusione logica di queste constatazioni.
Haut
Zusammenfassung
Das Studium der Auswirkungen der Gonadenbestrahlung auf die Vererbung
gründet sich vor allem auf Versuchsbeobachtungen. Die wichtigsten drei
Feststellungen: direktes Verhältnïs zwischen Häufigkeit der Mutationen und
Bestrahlungsdosis; Additionswirkung von aufeinander folgenden Bestrahlungen;
Fehlen einer Grenzschwelle gegenüber der mutagenen Wirkung - kann man häufig
auch bei Säugetieren beobachten. Nur die deutlichere Wirkung akuter
Bestrahlungen erschwert den chronischen Bestrahlungen gegenüber die
Bewertung.
Zwei verschiedene Arten von Beobachtungen beim Menschen gestatteten es
kürzlich, die Wirkungen der Bestrahlungen besser festzustellen.
Einerseits ist es die Untersuchung der Nachkommenschaft der
bestrahlten Individuen, welche Angaben über die Veränderungen der " sex
ratio" liefert.
Andererseits ist es die Analyse der in vitro und in vivo durch
Bestrahlung hervorgerufenen Chromosomen-Aberrationen, die es gestattet, das
Problem von einem neuen, fast experimentellen Gesichtspunkt aus zu
erfassen.
Insgesamt lassen die augenblicklichen Daten die Schlussfolgerung zu,
Boss die Verdöppelungsdosis für unsere Art sehr niedrig, wahrscheinlich enter
100 Roentgen liegt. Die logische Folgerung aus dieser Feststellung ist, jede
unnötige Bestrahlung der Gonaden formell zu Verurteilen.
Haut
Bibliographie
AHNSTROM G. et NATARAJAN A. T. 1960: Chromosome Breakage induced by
electrolytically produced freeradicals. Nature, 188, 961.
ALLISON A. C. 155. Aspects of polymorphism in man. Cold Spring Harbor
Symp. Quant. Biol., 20, 239-255. - 1959: Metabolic polymorphism in mammals, and
their bearing on problems of biochemical genetics. Am. Naturalïst., 93,
5-16.
ATWOOD K. C. et SCHEINBERG S. J. 1958: Somatic variation in Human
erythrocyte Antigens. J. of Cell. Comp. Phys., 52, 9'7, 123.
AUERBACH et ROBSON 1946: Chemical productive of mutations. Nature, 57,
302.
AVERY 0. T., McLEOD C. M., McCARTY M.: 1944: Studies on the chemical
nature of the substance inducing transformation of pneumococcal types.
BACQ Z. M. 1951: Cystéamine, protecteur par voie orale contre les
rayonnements X. Bull. Acad. Roy. Med. Belge, 18, 426.
BAKER et SGOURAKIS 1950 : The effect of oxygen concentration on the
rate of X ray induced mutations in Drosophila. Proc. Nat. Acad. Sci. Wash., 36,
176-184.
BENDER M. A.. 1958: X-Ray induced chromosome aberration in normal
diploid human tissue culture. Science, 126, 974-975. -1959: X-Ray induced
chromosome aberration nammalian cells in vivo and in vitro. Immediate and Low
level effects of ionizing Radiations (Taylor et Francis edit., pp.
103-118).
BOYD E., BUCHANAN W. W, et LENNOX B. 1961 : Damage to chromosomes by
therapeutic doses of Radioiodine. Lancet 1, 977-978.
CAVALLI-SFORZA L. L. 1960 Demographic attacks on Genetic problems. U.
N. Who Seminar on Use of Vital and Health statistics for Genetic and Radiation
Studies, Genève.
CARTER T. C., LYON M. F. et PHILLIPS R. J. S.1956: Brit. J. Radiol.,
29, 106. - 1957: In Rapport des Nations Unies, p. 184 (28).
CHU 1959 : C. R. Symposium on the immediate and low level effects of
ionizing radiations. Venise.
COUGHLIN C. A. et ADELBERG E. A. 1956: Bacterial mutation induced by
thymine starvation. Nature, 178, 531-532.
COURT BROWN et DOLL 1957: Leukaemia and aplastic anemia in patients
treated with X rays for ankylosing spondylitis. H. Mai. St. Off. Londres.
COURT BROWN W. M., DOLL R. et BRADFORD-HILL A. 1960 : Incidence of
Leukaemia after exposure to diagnostic radiation in utero. Brit. Med. J., 1,
539.
CROW J. F. 1955: A comparison of foetal and infant death rates in the
progeny of Radiologists and Pathalogists Am. J. Roentgenol., 73, 466-471.
DE BELLEFEUILLE P. 1960 : L'effet génétique des rayonnements
ionisants. C. R. Acad. Sci. Paris, 250, 2460-2462.
DEMEREC M. et FARROW J. G. 1930: Relation between X-ray dosage and the
frequency of primary non-disjunctians of X chromosomes in Drosaphila virilis.
Proc. Nat. Acad. Sel. Wash., 44, 390-401.
FORD C. E., JONES K. W., POLANI P. E., de ALMEIDA J. C., BRIGGS J. H.:
1959 A sex chromosome anormaly in a case of gonadal dysgenesis (Turner's
Syndrome).
FROTA PESSOA O. et SALDANHA P. H. I 960 : Am. Hum. Genet., 24, 33.
GLASS B. et RITTERHOFF R. K. 1961 Mutagenic affect of a 5 r Dose of X
Rays in Drosophila melanogaster. Science, 133, 1366.
HERTWIG P. 1938: Unterschiede in der Entwicklungsfähigkeit von FI
Mausen nach Roentgenbestrahlungen Spermatagonien fetigen und imfertigen
Spermatozaen. Biol. Zentr., 56, 273-301.
JAC0BS P. A. et STRONG J. A. 1959 : A case of human intersexuality
having a passible XXY sex determining mechanism. Nature, 183, 302.
KAPLAN I. I. 1957: J. Canad. Med. Ass., 76, 43-46.
KIMBAL R. F. 1959: Nuclear Syntheses and induction of mutation
Science, 130, 1417.
LAUGHLIN J. S. et PULLMAN I. 1957: The genetically significant
radiation dose received by the population of United States. Sect. III Gonadal
dose produced by medical use of X Rays. Prel. Edi. Washington D. C.
LEDERBERG J. 1956: Genetic transduction. Ann. Scientist., 44, 264.
LEJEUNE J. et TURPIN R. 1957 (a): Influence de l'âge des parents sur
la masculinité des naissances vivantes. C. R. Acad. Sci,, 25 mars 1957. - 1957
(b); Mutations radio-induites chez l'homme et dose de doublement. Sur la
validité d'une estimation directe. C. R. Acad. Sciences, 6 mai 1957. - 1958:
Sur le mécanisme génétique possible des radioleucémies chez l'homme. Sang,
9, 730-734.
GAUTIER M. et TURPIN R. 1959 : Le mongolisme, premier exemple
d'aberration autosomique humaine. Ann. Génet. 1, 2, 41-49. - 1959 : On two
possible markers of X ray induced chromosamal abnormalities in human tell. C.
R. Symposium of the immediate and low level affects of ionizing radiations.
Venise.
TURPIN R. et RETHORE M. O. 1959 : Les enfants nés de parents
irradiés. Cas particulier de la sex ratio. IX Congrès International de
Radiologie, Munich.
- TURPIN R., RETHORE M. O. et MAYER M. 1960 ; Résultats d'une
première enquête sur les effets somatiques de l'irradiation foetale in utero
(cas particulier des hétérachromies iriennes) Rev. Franc. Et. Clin. Biol., 5,
982-989.
LITMAN R. M. et PARDEE A. B. 1956: Production of bacteriophage mutants
by a disturbance of Desoxyribonucleic acid metabolism. Nature, 178,
529-531.
LUNING K. G. et coll. 1957, 1958: The recovery phenomenan after
irradiation in Drosophila melanogaster. Hereditas, 43, 549-577, 44,
161-173.
- STEN JONSSON 1958: Does there exist mutational adaptation to chronic
radiations. Radiat, Res., 8, 181-186.
- HENRIKSSON H. 0. 1959: Recoverable letal mutations in Drosophila
sperm. Nature, 183, 121-212.
MOUTSCHEN-DAHMEN J. et MOUTSCHEN-DAHMEN M. 1958: Sur l'évolution des
lésions causées par la 8-Ethoxycaféine chez Hordeum Sativum et vicia faba.
Hereditas, 44, 18-36.
MACHT S. H. et LAWRENCE P. S. 1955: National survey of congenital
malformations resulting from exposure to Roentgen Radiation. Am. J.
Roentgenol., 73, 442-466.
MULLER H. J. 1958: Advances in radiation mutagenesis through studies
on Drosophila. Proc. Sec. Int. Conf. an Pareful Uses of Atomic Energy, 22,
313-321.
NEEL J. V. SCHULL W. J. et coll. 1953: Effects of exposure of Atomic
bombs on pregnancy termination in Hiroshima and Nagasaki (preliminary report)
Science, 118, 537-541.
NEEL J. V. SCHULL W. J. et coll. 1956: Effects of exposure to Atomic
bombs on pregnancy termination in Hiroshima and Nagasaki. Nat. Acad. Sci.
U.S.A., Publi., 461.
PATTERSON J. T., BREWSTER W. et WINCHESTER A. M. 1932: Effects
produced by aging and X raying eggs of Drosophila melanogaster J. of Heredity,
23, 325-333.
PENROSE L. S. 1956: Mutations in man. Act. Genet. Stat. Med. 6,
168-182.
PUCK T. T, 1958: Action of Radiation on mammalien cens, Proc. Nat. Ac.
Sc. U.S.A., 44, 772-780.
REBOUL et coll. 1957: Dose gonade en Radia-diagnostic. Document des
Nations Unies A/AC82/G/R 194.
RETHORE M. O. 1957: Influence des Radiations Atomiques sur le
patrimoine héréditaire humain. 1 volume Doin. édit.
RUSSEL W. L. 1957: Shortening of Life in the Offspring of male mice
exposed to neutron radiation from an Atomic Bomb. Proc. Nat. Acad. Sc. U.S.A.,
43, 324-329.
RUSSEL L. B. et MAJOR M. H. 1957: Radiation induced presumed somatic
mutations in the pause moule. Genetic 42, 161-175.
RUSSEL W. L., RUSSEL L. B. et KELLY E, M. 1958: Radiation dose rate
and mutation frequency. Science, 128, 1546-1550.
RUSSELL W. L., RUSSELL L. B. et KELLY E. M. 1960: Dependance of
mutation rate on radiation intensity. Symposium on the Immediate and low level
effects of ionizing radiation. Edit. Taylor Francis, London.
RUSSELL 1961 : Communication orale, Comité Scientifique sur les
effets des Radiations atomiques. Genève, 1961 . Rapport du Comité
Scientifique des Nations Unies sur les effets des Radiations Atomiques O.N.U.,
New York, 1958.
RUSSELL W. L.: in Radiation Biology. Vol. I, p. 825, Mac Grave Hill
Edit., New York, 1954.
SCHULTE P. J. L. et SOBELS F. H. 1961: Summary of data collected in
the Netherlands on sex ratio shifts among offspring of patients after
therapeutic exposure to X-irradiation. Nation Unies. Comité Scientifique sur
les effets des Radiations atomiques. Séances 13-24 mars, Genève 1961.
SCHULL W. J. et NEEL J. V. 1959: Radiation and the Sex ratio in Man.
Science, 125, 343-347.
SOBELS F. H. 1960 : Chemical steps involved in the production of
mutations and chromosome aberrations in Drosophila. Intl. J. Rad. Biol., 2,
68-90.
STERN, C. 1960 : Principle of Human Genetics. Freeman and Co. Édit.,
San Francisco, London.
STEWARD A. et WEBB J. 1958: A survey of childhood malignancies. Brit.
Med. J., 9, 1495-1508.
STEWARD A. M. et HEWITT A. A. 1959: Epidemicology of Hunan leukaemia.
Brit. Med. J., 15, 73-77.
STEWART J. S. S, et SANDERSON A. R. 1961 : Chromosomal aberration
after diagnostic X-irradiation. Lancet, 1, 978-9'79.
TANAKA, KATUMI et Koji OHKURA 1958. Évidence for Genetic effects of
radiation in offspring of Radiological techniciens. C. R. X Congrès
international de Génétique, Montréal, McGill University Edit.
- The hazard to Man of nuclear and allied Radiations. H.M.S.D.,
Londres, 1956.
TOUGH I., BUCKTON K. E., BAIKIE A. G, et COURT BROWN W. M. 1960 :
X-Ray induced chromosome damage in man. Lancet 1960, ii 849-851.
TURPIN R. et LEJEUNE J. 1955: Influence passible sur la stabilité du
patrimoine héréditaire humain de l'utilisation de l'Énergie Atomique. Bull.
Acad. Nat. Med., p. 104.
- RETHORE M. O. 1956: Étude de la descendance de sujets traités par
radiothérapie pelvienne. Act. Genet. Stat. Med , 6, 204-216.
- LAMY M., BERNARD J., LEFEBVRE J, et LEJEUNE J. 1957: Sur la
nécessité de limiter l'exposition aux radiations ionisantes. Arch. fr. Péd.,
XIV, 10.
- DUPIRE M,, LEJEUNE J., JAMMET H. 1958: Étude de la dose gonade lors
des examens radio-photographiques systématiques. Evol. Med., 4, 361-366.
- LEJEUNE J., LAFOURCADE J., et GAUTIER M. 1959: Aberrations
chromosomiques et maladies chromosomiques. La Polydysspondylie à 45
chromosomes. C. R. Acad. Sci., 248, 3636-3638.
ZINDER N. D, et LEDERBERG J. 1952 : Genetic exchange in salmonella J.
Bacteriol., 64, 679.
|