L'efficacité du régime carencé en phénylalanine montre que la
débilité provoquée par l'inactivité de la phénylalanine-4-hydroxylase est
évitée si les métabolites nocifs ne peuvent s'accumuler.
A côté des effets observés sur la sérotonine (1), il se pourrait
que la phényl-éthyl-amine signalée chez les phénylcétonuriques (2), jouât
le rôle de faux-médiateur chimique, entrant en compétition avec les
médiateurs normaux pour les sites récepteurs ou les sites de stockage.
Une situation analogue pourrait se rencontrer dans la trisomie 21 si
la chaîne métabolique passant par la tyrosine se trouvait accélérée. La
tyramine est un faux-médiateur et il se pourrait que certains de ses
métabolites puissent inhiber le tonus musculaire.
Cette hypothèse rendrait alors compte de l'hypertonie des
phénylcétonuriques et des monosomiques 21, en opposition avec l'hypotonie des
trisomiques 21.
Un tel processus de compétition entre médiateurs pourrait aussi
rendre compte de la sensibilité anormale des trisomiques 21 à l'atropine [(3),
(4)], et de leur réponse paradoxale à l'éphédrine (5).
En raison des très faibles quantités présumées, la recherche des
métabolites nocifs dans les liquides biologiques ne pourrait être tentée que
si leur structure pouvait être connue d'avance. Pour ce faire, un modèle
théorique du " récepteur " serait nécessaire.
Si l'on admet que la fixation des médiateurs chimiques se réalise
par attraction de charge, pont hydrogène et forces de van der Waals, on
pourrait envisager un polypeptide cyclique dont la couronne de carbonyles
établirait une barrière de charge interdisant les échanges d'ions au centre
de figure. La collerette de résidus d'acides aminés fournirait les sites
récepteurs sur lesquels se fixeraient les médiateurs chimiques. L'azote
aminé de ces derniers serait ainsi amené à proximité de la couronne de
carbonyles, modifiant de ce fait la barrière de charge.
Dans un tel modèle, la conformation de la séquence
arginine-phénylalanine-histidine serait exactement adaptée à celle de la
noradrénaline. D'autres séquences du polypeptide cyclique correspondraient à d'autres sites, par exemple : histidine pour le site muscarine ;
phénylalanine--histidine pour le site nicotine ;
histidine-phénylalanine-histidine pour la sérotonine, etc.
De proche en proche une analyse du modèle permettrait d'établir un
code des récepteurs et de prévoir les structures capables d'entrer en
compétition avec les médiateurs normaux.
Ce type de recherche ne prétend nullement décrire de façon
exhaustive le méca- nisme des connexions cérébrales ainsi que leurs
anomalies, mais il apparaît qu'une démarche de ce genre serait indispensable
à une analyse cohérente des processus anormaux.
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Bibliographie
(1) C. M. B. PARE, M. SANDLER et R. S. STALLY, Arch. Dis. Childhood,
34, 1959, p. 422.
(2) J. A. OATES, P. Z. NIRENBERG, J. B. JEPSON, A. SJOERDOMA et S.
UDENFRIEND, Proc. Soc. exp. Biol. med., 112, 1963, p. 1078.
(3) J. BERG, M. W. G. BRANDON et B. H. KIRMAN, Lancet, 2, 1959, p.
441.
(4) W. S. MARRIS et R. M. GOODMAN, New Engl. J. Med., 279, 1968, p.
407-409.
(5) J. KUCERA, 1er Congrès sur l'Arriération mentale, Montpellier,
1967 ; J. Ment. Def. Res.,13, 1969, p. 143-148.
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